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Les dérives de la propriété industrielle
" Jamais, je n'aurais imaginé que les hommes puissent breveter les plantes et les animaux. Cela est fondamentalement immoral, contraire à la vision qu'ont les Guayamis de la nature et de notre place en son sein. Breveter le matériel humain, prendre l'ADN humain et breveter son produit, c'est violer l'intégrité de la vie elle-même et notre sens profond de la moralité." Le Président du Congrès Général des Guayamis, apprenant l'existence d'un brevet sur les gènes d'une femme Guayami. SOMMAIRE
Introduction I Rappels sur la propriété industrielleII Exemple 1 : PI et agriculture 1) Les brevets entravent la recherche 2) brevet vs biodiversité 3) injustices et dépendance des paysans 4) Alternatives au brevetage 1) conséquences sur la recherche 2) conséquences sur les populations pauvres 3) améliorations possibles ? Introduction
Force est constater la prédominance du modèle libérale dans le monde actuel. Depuis la chute du mur de Berlin et l’effondrement de la plupart des puissances communistes, l’hégémonie des Etats-Unis ne rencontre plus aucune résistance (à leur échelle) pour imposer la mondialisation libérale. Pour accomplir cette tâche, les Etats-Unis s’appuient sur les institutions de Bretton Woods dont ils ont le contrôle (grâce, entre autre, au droit de veto qu’ils possèdent de fait au FMI). Ces institutions censées réglementer l’économie mondiale (réduire la pauvreté en ce qui concerne la Banque Mondiale et lutter contre l’instabilité économique dans le monde pour le Fonds) ont jusqu’à présent toujours basé leurs analyses sur une croyance inconditionnelle aux théories néolibérales. Il convient donc d’analyser ces théories afin de comprendre les choix économiques internationaux. Nous nous attacherons dans ce dossier à un cas où les hypothèses microéconomiques ne sont pas applicables : les externalités. Les externalités sont les effets de l’activité d’un agent sur les autres sans passer par le marché. La R&D fait parti des externalités : elle comporte des incertitudes sur ses avantages et les retombés technologiques de la R&D peuvent être exploitées par une firme qui n’a rien dépensé (comportement de free rider). Ce problème nécessite une intervention publique et a entraîné la création d’une législation sur la propriété industrielle. Ainsi, pour atteindre l’équilibre du marché, il est nécessaire de créer un droit d’interdire caractérisé par la mise en place du système de brevets. Cependant, si les brevets assurent le bon fonctionnement de l’économie en protégeant les inventeurs, qu’en est-il des consommateurs ? Le brevet accorde en quelque sorte un monopole à l’inventeur avec toutes les conséquences prédites par la microéconomie. Dès lors, on peut se demander s’il n’est pas vain de vouloir stimuler la création si le consommateur n’a pas les moyens d’accéder à l’innovation. Nous essaierons également de voir si la législation sur la propriété industrielle ne risque pas d’accroître les inégalités dans le monde. Pour tout cela nous nous appuierons sur deux exemples d’actualité : l’agriculture et la santé. I Rappels sur la propriété industrielle
Il existe divers outils pour protéger ses inventions en fonction de la nature de celles-ci (invention, dessin ou marque). Pour les besoins de ce dossier, nous n’analyserons que le brevet. Le brevet est le titre de propriété industrielle qui confère à son titulaire, inventeur ou entreprise, un droit exclusif sur une invention pour une période de vingt ans. En France, pour l’obtenir, il convient de déposer une demande auprès de l’INPI. Après examen et publication, le brevet sera délivré : paradoxalement, le brevet rend l’innovation publique en même temps qu’il la protège. Pour être brevetable, l’invention doit être nouvelle, impliquer une activité inventive, et être susceptible d’application industrielle. Les quatre termes précédant sont relativement ardus à définir clairement et leur appréciation relève parfois du subjectif. On trouve dans les documents de l’INPI une remarque abondant de ce sens : « Les documents permettant d'apprécier la nouveauté et l'activité inventive étant innombrables, on ne peut jamais être certain a priori de la brevetabilité d'une invention ». Autrement dit, l’inventeur peut soit faire une demande de brevet directe auprès de l’INPI au risque d’engager des frais inutiles, soit recourir à un conseiller en propriété industrielle. Et l’abondance de ces derniers (plus de 500 en France selon la CNCPI) n’est peut-être pas anodine. Par ailleurs, une fois la brevetabilité établie, il reste à établir la demande. Celle-ci doit être bien rédigée pour que elle soit acceptée et que le brevet soit efficace face aux contrefacteurs. Là encore, l’INPI conseille de confier la rédaction de la demande à un professionnel. Au niveau mondial, c’est l’OMPI (Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle) qui tente d’instaurer une réglementation des procédures de demande de brevet. Elle se base sur l’Accord général sur les aspects des Droits de Propriété Intellectuelle liés au Commerce (ADPIC) pour les pays membres de l’OMC. Le brevetage du vivant débute en 1873 : Louis Pasteur obtient un brevet sur les levures en tant que produit issu d’un procédé. Mais c’est en 1980, aux Etats-Unis que le premier organisme transgénique est breveté : il s’agit de la bactérie Escherichia Coli. L’Office américain des brevets déclare alors : « Toute composition ou fabrication de matières n’existant pas naturellement est couverte par le brevet, notamment les organismes multicellulaires vivants et les animaux qui sont les produits de l’ingéniosité humaine ». Le premier animal breveté est une souris à laquelle on a inséré un gène de cancers humain (en 1988). En 1998 l’Europe suit les Etats-Unis et en 1999 le génome humain commence à être breveté ( par l’entreprise privé Celera ). II Exemple 1 : PI et agriculture
1) Les brevets entravent la recherche : Créés pour stimuler la recherche en protégeant les inventeurs, les brevets n’ont pas que des effets positifs sur les activités de recherche. En effet, aucune entreprise n’investirait les sommes importantes que nécessite la recherche si elle devait partager les bénéfices de ses inventions avec d’autres entreprises «pirates». Les brevets ont donc pour objectif de rendre plus intéressant d’investir dans la recherche plutôt que d’attendre les inventions des autres. Mais tout n’est pas aussi simple et il convient de faire des distinctions selon la nature des inventions que l’on souhaite breveter. Le cas des OGM (Organismes Génétiquement Modifiés ) révèle les limites du système des brevets pour stimuler la recherche. L’identification d’un gêne ou d’une séquence génétique est une découverte ( donc non brevetable ) mais l’identification de la fonction de ce gêne est une invention. Ainsi, il est possible de breveter un gène sans avoir trouver d’applications industrielles l’utilisant. Une fois le brevet déposé, il est interdit à toute autre personne d’exploiter ou de faire des recherches sur les variétés comportant ce gène. Il revient alors au détenteur du brevet de découvrir seul toutes les applications de ces variétés. Le brevetage de gènes impose non seulement à tous les organismes de recherche travaillant sur une espèce dont un des gènes a été breveté de cesser leur activité, mais laisse, de plus, au détenteur du brevet, et à lui seulement, le choix des utilisations des variétés brevetés. Ainsi, étant donné l’importance des investissements nécessaires pour être à la pointe de la recherche biotechnologique, seul un petit nombre de personnes déterminent les orientations de la sélection pour toute une série de culture. Il risque d’en résulter : - d’une part, une agriculture standardisée, uniformisée, purement marchande et ne solutionnant pas les problèmes de certains pays. - d’autre part, une disparition de la recherche publique sur la valeur nutritionnelle des plantes transgéniques, sur leur résistance à la sécheresse, à la salinité des sols ou à d’autres conditions typiques des systèmes agricoles difficiles et des paysanneries pauvres. D’autant plus que la recherche publique n’a pas les moyens financiers pour faire face aux coûts des dépôts de brevets. Le monopole des entreprises agrochimiques suscite une interrogation par rapport à la biodiversité. Comment le monopole d’une entreprise sur une variété végétale peut-il ne pas entraîner un appauvrissement des ressources agricoles ? Lorsqu’une entreprise découvre un gène, elle peut déposer un brevet et dispose alors des droits sur toutes les variétés contenant ce gène. Elle peut interdire à quiconque d’utiliser ce gène même si cette tiers personne a inventé à partir de la variété breveté une variété plus performante. Le brevet interdit en particulier d’effectuer des croisements. Or les croisements et la sélection sont depuis toujours les méthodes qui ont permit l’amélioration des espèces ainsi que la biodiversité. Lorsqu’un brevet est déposé, ces processus sont interdits et on ne trouve plus que les variétés vendues par la firme détentrice du brevet. Pour assurer encore plus leur monopole et annihiler toute tentative de fraude, des entreprises ont mis au point la technologie Terminator. Il s’agit d’introduire dans une variété un gène qui stérilise ses semences. Les paysans doivent donc racheter les semences chaque année. On ne voit pas bien l’intérêt pour les paysans d’une telle technologie à l’opposé de tous les discours sur le développement durable. En octobre 1999, Monsanto (multinationlale détentrice du brevet) a renoncé à utiliser cette technologie, mais continue les études. Face aux excès du brevetage, la convention de Rio sur la diversité génétique (1992) a donné aux Etats la propriété des ressources génétiques. L’accès à ces ressources est donc de plus en plus difficile car ils constituent une richesse nationale. Cependant, cet accès reste toujours plus facile aux entreprises qu’à la recherche publique en raison de leurs importantes capacités financières. En dehors des problèmes biologiques et environnementaux engendrés par une réduction du nombre de variétés végétales, le système des brevets entraîne des problèmes économiques dans certaines régions. En effet, une entreprise ne recherchant que le profit ne va développer sa variété que dans les secteurs les plus bénéfiques et ne répondra pas aux besoins du Sud. Ainsi, le Mexique se voit cultiver la tomate Zeneca, variété dont le processus de mûrissement a été ralenti : cette amélioration ne concerne que le marché de Etats-Unis puisqu’au Mexique les tomates sont disponibles toute l’année. 3) injustices et dépendance des paysans : C’est grâce à « cette création, à cette amélioration, à cette conservation et à cet échange collectifs entre les générations et les communautés, que le savoir, les technologies et la biodiversité sont devenues des biens communs gérés collectivement par les communautés, et dont celui qui le veut peut se servir. Payer pour y avoir accès est une pratique inconnue, car l’échange réciproque est un élément indispensable à la perpétuation du système » Tewolde Egziabher et Sue Edwards, de L’ISD (Institut pour le développement durable) d’Ethiopie. Dans un premier temps, il faut noter l’injustice que constitue l’attribution de brevets sur les semences. Dans ce système on ne tient pas compte du travail des agriculteurs. Ceux-ci replantent chaque année une partie de leur récolte. En sélectionnant, depuis des générations, les plus belles graines, ils ont contribué à créer les variétés les mieux adaptées aux particularités des régions où elles sont produites. On comprend alors la colère des agriculteurs face aux entreprises « des sciences de la vie » qui s’emparent impunément de ce patrimoine et le brevettent. Par le simple fait d’identifier les gènes des semences sélectionnées au fil des générations par les agriculteurs, les entreprises peuvent non seulement faire payer l’utilisation de ces semences aux agriculteurs mais également leur interdire de les améliorer ( grâce à aux croisements ). Récemment, une université du Colorado a breveté une variété traditionnelle de quinoa. Le brevet pourrait s’étendre à toutes les variétés de quinoa cultivées par les paysans de Bolivie, du Pérou, d’Equateur et du Chili. Ces paysans ne toucheront aucune part des bénéfices et devront peut-être arrêter de cultiver le quinoa… Par ailleurs, en introduisant quelques gènes bénéfiques dans une variété, une firme peut breveter la nouvelle variété et devenir propriétaire des ressources génétiques de la variété mère qui est en grande partie le fruit du travail de générations d’agriculteurs-sélectionneurs des PED. Selon un rapport des Nations unies, le manque à gagner pour les pays en développement, qui se voient dépossédés de leurs ressources au profit des firmes multinationales, s’élèverait à 5,4 milliards de dollars par an ! Il y a là un paradoxe flagrant à résoudre. Les OGM sont souvent présentés comme une solution pour nourrir les 800 millions de personnes sous-alimentées de la planète. Or tous les OGM sont brevetés et ne risquent donc pas d’aider les populations les plus défavorisées. En effet, pour un brevet couvrant l’Europe, les Etats-Unis, le Japon et le Canada, il faut compter au minimum 90 000 €. Autrement dit, seules les grosses entreprises occidentales peuvent s’offrir des brevets (90% des OGM commercialisés sont brevetés par des organismes privés). L’aide aux pays pauvre dépend donc de leur bon vouloir. Aujourd’hui les agriculteurs des pays du Sud font parti des personnes qui souffrent le plus de la faim. A ce problème on peut trouver deux explications liées aux brevets : - D’une part, le brevet interdisant le recours aux semences de fermes (ie les semences provenant d’une partie de la récolte de l’année précédente), les paysans sont contraints de racheter chaque année les semences aux firmes ayant les brevets. Cela accroît leur dépendance vis à vis de l’économie des pays riches. A cela, il faut ajouter le fait que certaines firmes développent leurs traitements chimiques en parallèle avec les OGM : le paysan est alors contraint d’acheter toute la gamme de produits de cette firme et de suivre la logique d’innovation de celle-ci. Les études économiques réalisées essentiellement aux Etats-Unis, montrent qu’une fois payés les coûts additionnels dus à l’achat des semences et au paiement des licences, le bénéfice pour les agriculteurs est nul et parfois négatif du fait de rendements peu fiables, à l’exception du coton. - D’autre part, les firmes agrochimiques ont tendance à favoriser une agriculture industrielle et intensive aux dépends de l’agriculture traditionnelle et vivrière. Or une disparition des cultures vivrières contribuerait à mettre en danger la sécurité alimentaire des pays les plus pauvres. De plus, les recherches des firmes n’ont pas pour fin de développer les technologies les plus utiles socialement mais plutôt les plus rentables. Le système de brevet est donc inadapté pour les PED qui possèdent néanmoins l’essentiel de la biodiversité mondiale et donc des ressources génétiques. Or ces ressources sont dans le domaine public (ou protégées par des Droit d’Obtention Végétal) alors que les développements scientifiques et technologiques sont dans le domaine privé, c’est-à-dire inaccessibles aux PED. On peut, par exemple, se demander combien des 200 espèces de plantes actuellement entretenues et utilisées par les Suazi diparaitront si le Swaziland tombe sous l’emprise du brevetage incontrôlé. D’autres systèmes que celui des brevets existent : - Le système UPOV (Union pour la Protection des Obtentions Végétales ) date de 1961. A l’origine, ce système permettait de protéger les sélectionneurs tout en laissant la nouvelle variété en libre accès. Ainsi, l’obtenteur est le seul à pouvoir produire la variété mais ne peut pas interdire l’utilisation de celle-ci par une personnes qui souhaiterait, par exemple, l’améliorer : il y a exemption de la recherche. L’UPOV laisse également aux Etats l’accord du droit à réensemencer sans payer de redevance à l’obtenteur. - Le système sui generis permet une législation mieux adaptée aux différents pays en les autorisant à prendre en compte leurs préférences nationales. « Le type de droits dont l’Afrique a besoin, ce n’est pas les DPI, sous monopole de l’entreprise privée, mais des droits qui soutiennent les communautés locales, les agriculteurs, les populations indigènes, et les efforts qu’ils ont accomplis tout au long du dernier millénaire pour conserver et améliorer la biodiversité pour le bénéfice de l’humanité entière. » Prof. J.A. Ekpere, chercheur, Commission de la Technologie et de la Recherche de l’OUA. Examinons le modèle de l’OUA. Ce modèle interdit tout brevet sur quelque forme de vie que ce soit et soutient activement le rôle des femmes. Il possède quatre composantes : 1) L’accès aux ressources biologiques : Cet accès nécessite une autorisation et l’accord informé préalable des communautés ; le règlement de droits de collecte ; le partage des bénéfices des produits commercialisés ; etc. 2) Les droits des communautés : Ces droits inaliénables et collectifs impliquent le contrôle de l’accès aux ressources et aux connaissances ; la perception de 50% de tous les bénéfices reçus par le gouvernement sous le régime d’accès ; le plein exercice de leurs droits de propriété intellectuelle, etc. 3) Les droits des agriculteurs : Ces droits impliquent la protection des récoltes et des semences en accord avec les critères issus des pratiques traditionnelles, le droit de conserver, d’utiliser, de multiplier et de vendre les semences, sous réserve que le matériel possédé par un sélectionneur ne soit pas diffusé à l’échelle commerciale. 4) Les droits des sélectionneurs : Ces doits impliquent la propriété intellectuelle sur les nouvelles variétés qui sont distinctes, stables et suffisamment homogènes ou multilignées, et le droit exclusif de vendre et de produire ces variétés, etc. Au niveau international, des conventions et des programmes politiques existent afin de promouvoir la conservation et l’utilisation durable, ainsi que le partage des bénéfices issus de l’utilisation des ressources biologiques. Mais ils sont peu appliqués. On peut par exemple rappeler la Convention sur la Biodiversité entrée en vigueur en 1993. Elle engage les 170 signataires sur un certain nombre de principes de base concernant la question de savoir comment, par qui, et pour le profit de qui la biodiversité doit être conservée. Elle affirme : - l’importance de la contribution des populations des pays en développement à la conservation de la biodiversité mondiale ; - que la biodiversité n’est pas un « don de la nature » mais le résultat des actions de la communauté où les femmes en particulier jouent un rôle vital ; - le fait que la biodiversité est intrinsèquement co-dépendante des différentes cultures, systèmes de connaissances, et styles de vie qui la génèrent et la maintiennent ; - que la conservation in situ (locale) des ressources biologiques est plus durable que la conservation ex situ (dans des banques de gènes) ; - que les droits des communautés locales, ainsi que ceux des Etats, sont nécessaires pour protéger les ressources biologiques et leur conservation. Cependant, aujourd’hui seule quatre multinationales se partagent le secteur des biotechnologies agricoles : Syngenta (Novartis et Astra-Zeneca), Aventis, Monsanto et DuPont. Ce quasi-monopole ne répond ni aux besoins des plus démunis, ni aux interrogations des citoyens du monde. Il faudrait inverser les raisonnements : on a tendance à vouloir chercher coûte que coûte une application aux biotechnologies alors qu’il serait plus utile de chercher les solutions à un problème donné. De plus, les Etats devraient avoir leur mot à dire face aux décisions des grosses firmes afin de développer une agriculture tournée vers le bien commun de leur population. Par exemple, en mettant à disposition des PED les technologies utiles au développement agricole ou en assurant un partage équitable des bénéfices des résultats de la recherche entre le public et le privé. De nombreuses questions extérieures au marché restent sans réponse. Ainsi, il ne pourrait qu’être bénéfique de se mettre d’accord sur les différences entre découverte et invention ; de décréter la biodiversité bien commun de l’humanité ; ou encore de fixer les façons de prendre en compte la protection des connaissances traditionnelles. III Exemple 2 : PI et santé
1) conséquences sur la recherche : Comme pour les semences agricoles, les brevets, censés favoriser l’innovation et l’investissement dans la recherche, réussissent surtout à conforter les monopoles des grosses entreprises pharmaceutiques aux dépends de la recherche public. Il est vrai que les investissements nécessaires au développement d’un nouveau médicament (entre 10 et 800 millions de dollars suivant les sources) rendent indispensable, dans le système économique actuel, l’existence d’une protection efficace. Cependant, le marché des médicaments n’est pas un marché comme les autres : la santé ne peut pas être laissée aux mains de quelques entrepreneurs privés. Pour illustrer les risques que les brevets ( et notamment le floue qui existe entre invention et découverte ) font encourir à la recherche, prenons l’exemple du brevet sur le gène CCR5. En mars 2000, la société Human Genome Sciences (HGS) demande un brevet sur le gène CCR5 qui code pour l’un des récepteurs de la surface des cellules. Au moment de la demande, HGS ne connaît aucune application pour ce gène mais un groupe de chercheurs du National Insitute of Health (financés sur fonds publics) découvre des relations entre ce gène et l’infection par le VIH. Ensuite, HGS entend parler des ces recherches, confirme ces relations et se fait délivrer le brevet. On peut se demander si l’étape créatrice nécessaire à l’attribution du brevet réside dans la découverte (par hasard) par l’entreprise du gène ou dans la détection par les chercheurs des liens entre le gène et le VIH. Depuis, de nombreux laboratoires universitaires ont abandonné leurs recherches sur certains gènes de peur de devoir payer des royalties exorbitantes ou d’être traînés en justice. Une entreprise privée n’oriente pas ses recherches en fonction des besoins les plus importants ou touchant le plus grand nombre d’individus mais en fonction de l’existence de marchés. Ainsi, sur les 1300 médicaments créés en 20 ans, 13 seulement touchent les maladies tropicales (dont 10 sur les 13 liés à la recherche vétérinaire ou militaire). Or 90% des malades sont dans les PED. Mais les patients de ces pays ne sont pas solvables. C’est pourquoi de nombreuses maladies sont négligées. Ainsi, la leishmaniose, la maladie du sommeil, la maladie de Chagas tuent chaque année plusieurs centaines de milliers de personnes dans les pays pauvres mais n’intéressent pas les laboratoires occidentaux (marché non solvable). Du fait du désintéressement des laboratoires pharmaceutiques pour certaines maladies, des médicaments disparaissent car leur production n’est plus assurée et les médicaments devenus inefficaces ne sont pas remplacés. Ajoutons à cela des prix élevés et nous comprenons pourquoi un tiers de la population mondiale n’a pas accès aux médicaments essentiels. 2) conséquences sur les populations pauvres : Aujourd’hui, seulement 4% des malades du SIDA ont accès aux antirétroviraux. En 2000, deux millions de personnes sont mortes de tuberculose (ie environ trois World Trade Center par jour pour une maladie dont on connaît un traitement efficacement !), un million du paludisme faute de traitement efficaces accessibles. La santé à un coût que ne peuvent pas supporter les malades les plus pauvres. Tout d’abord, les firmes pharmaceutiques appliquent des prix exorbitants. Trop souvent, les prix des médicaments ne sont pas des prix de marché calculés en fonction des coûts de recherche et de production mais des prix fixés en fonction des capacités des pays développés à les acheter. Les médicaments sont donc inaccessibles à la majorité des patients de la planète. En revanche, les industries pharmaceutiques ont une rentabilité comprise entre 15% et 25% de leur chiffre d’affaires (sans compter les scandales comme celui de la Stavudine en janvier 2002). Ceci est paradoxale si l’on considère que ces industries ont pour objectif de promouvoir la santé pour tous. En 1997, les accords de Bangui imposent l’application des Accords Internationaux sur la Propriété Intellectuelle (ADPIC). Ces accords définissent un système de protection international. Ils autorisent en particulier l’utilisation de licences obligatoires pour des pays en situation d’urgence sanitaire. Ces licences permettent d’exploiter un brevet sans l’accord du détenteur. Ainsi, le Brésil et l’Inde se sont lancés dans une production autonome de certaines molécules. Les prix des antirétroviraux brésiliens ont baissé de 80% en 5 ans ! Mais à partir de 2006, les importations parallèles devraient être interdites : les pays détenteurs de licences obligatoires ne pourront approvisionner que leur propre population. Cela risque d’être désastreux pour les pays qui ne peuvent pas fabriquer leurs médicaments localement. Par exemple, le Malawi ne pourra plus se procurer les antirétroviraux bon marché pour lutter contre le SIDA mais devra se soumettre aux coûts des laboratoires occidentaux. En 1995, l’entreprise Myriad dépose un brevet sur le gène BRCA2 (dont la paternité est contestée par l’Institut britannique de recherche sur le cancer) qui lui assure le monopole sur les tests de dépistage de cancer du sein. Suite à ce scandale (qui alourdit encore la facture de la santé), la communauté internationale des chercheurs organisa une rencontre aux Bermudes pour que le génome reste dans le domaine public. Les participants s’engagèrent à diffuser automatiquement les assemblages de séquences de plus de mille bases (sous 24 heures) et à publier immédiatement les séquences annotées finies afin de rendre toute la séquence accessible, dans le domaine public, à la fois pour la recherche et le développement. Assurer immédiatement l’antériorité des découvertes est le meilleur moyen pour lutter contre l’assaut des brevets. Ce genre de déclarations sont importantes car elles se basent sur l’objectif de maximiser les avantages pour l’ensemble de la société. Il est assez difficile d’évaluer les coûts de réalisation d’un nouveau médicament. Les entreprises pharmaceutiques mettent, de plus, en avant les risques que le médicament ne passe pas les tests sur l’homme (ces tests sont onéreux et longs). Cependant, en Octobre 2001 l’entreprise Bayer a montré qu’il était tout à fait possible de diminuer les prix en cédant des stocks de Cipro (un antibiotique contre le bacille du charbon) : mais tout le monde n’a pas les mêmes moyens de pression que le gouvernement américain … On peut également se demander pourquoi les prix des médicaments diffèrent d’un pays à l’autre ( même au sein des membres de l’OCDE ). Il pourrait être utile que les entreprises ouvrent à tous leurs livres de compte et fixent un prix raisonnable, n’abusant pas du monopole que lui confère les brevets. De plus, une baisse des prix pourrait entraîner une augmentation des ventes (aujourd’hui les ¾ de la population ne consomment que 8% des médicaments). Les entreprises n’ont donc pas tout à perdre ; elles gagneront au moins une conscience. L’accès aux médicaments les plus récents peut se faire grâce aux licences obligatoires. Le risque pour les entreprises est que leurs médicaments soient fabriqués dans les pays du Sud détenteurs de licences obligatoires et soient revendus moins cher sur les marchés occidentaux. En fait, il suffirait d’adopter un packaging et des noms différents pour que le client des pays riches fasse la différence. Les réticences face aux médicaments génériques montrent bien que l’emballage comptent plus que la molécule sous nos latitudes. Au-delà de 20 ans, les brevets tombent. C’est alors que certains pays du Sud qui en ont les capacités peuvent produire eux-même des médicaments génériques. Les médicaments génériques sont des médicaments qui ne sont plus sous brevet. Cependant tout n’est pas encore gagné : les Accords sur la propriété intellectuelle (Adpic) soumettent la production et le commerce des traitements génériques de SIDA au bon vouloir des sociétés pharmaceutiques détentrices des brevets initiaux. Ainsi, en mars 2002, sous la pression de ces firmes, 16 pays africains signataires de l’accord de Bangui se sont vu refuser l’utilisation de génériques. Enfin, certaines décisions laissent un peu d’espoir pour la reconnaissance de la primauté de la vie sur le profit. On peut noter, par exemple, le procès de Pretoria en avril 2001. Intenté par 39 entreprises pharmaceutiques contre l’Afrique de Sud, ce procès visait l’annulation de l'«Amendement de la loi sur le contrôle des médicaments et des substances apparentées ».Cet amendement autorise les importations parallèles, les licences obligatoires et la production de médicaments génériques. Finalement, ce procès a été perdu par les laboratoires. IV Conclusion
Ce panorama rapide des systèmes agricoles et pharmaceutiques montre à quel point les mécanismes du marché sont inadaptés dans certains domaines. Ces mécanismes apparaissent notamment impuissants pour défendre des droits essentiels comme l’accès à la santé et à une alimentation équilibrée. En novembre 2001, à Doha, l’OMC a reconnu le caractère prioritaire des impératifs sanitaires sur les règles commerciales. Cela ressemble une un grand progrès après des décennies de croyances libérales, mais n’est-ce pas la base des sociétés traditionnelles que nous redécouvrons là ? les échos des cris depuis longtemps poussés par des hommes las ! L’importance qu’a pris la législation sur la protection de la propriété intellectuelle nous pousse à nous poser des questions sur la propriété des ressources génétiques et des plantes transformées génétiquement. Autrement dit : à qui appartient la nature ? Et le marché exige une réponse : tout doit appartenir à quelqu’un. Il semble pourtant plus urgent de réfléchir sur la notion de bien public mondial. En
particulier, les ressources génétiques et l’eau doivent être gérées pour permettre un développement durable. Elles ne doivent pas être privatisées, de quelque façon que ce soit, et doivent être déclarées patrimoine commun de l’humanité, et donc bien public mondial. Malheureusement, ce patrimoine a du mal à trouver sa place au sein des accords concernant la propriété intellectuelle. Le respect et la citoyenneté n’ont pas de valeur marchande il faudra donc gérer ces externalités ou tout sera vendu. Le Monde n’est pas une marchandise ! % % % % % % % % % % % % % % % % % Références
La revue des Volontaires du Progrès (N°27) Publications de Solagral Publications des Amis de la Terre Publications du CRID Publications de GRAIN (Genetic Resources Action INternational) Alternatives internationales (N°5) Le Monde diplomatique (N°575 et 585) L’économie en question sur France Culture (6 janvier 2003)

Source: http://petit-bazar.unige.ch/www/0news/envir/pi.pdf

Doi:10.1016/j.jpeds.2005.03.005

MIXED DONOR CHIMERISM AND LOW LEVEL IDURONIDASEEXPRESSION MAY BE ADEQUATE FOR NEURODEVELOPMENTALJENNIFER CONWAY, MD, SARAH DYACK, MD, FRCPC, FCCMG, BRUCE N. A. CROOKS, MB, CHB, BSC, MRCP,Hurler syndrome is a lysosomal storage disease resulting in fatal cardiac or neurologic sequelae unless alpha-iduronidaseproduction is reconstituted with hematopoietic stem cell transplantation. We report on a

fibrousdysplasia.org

The Journal of Clinical Endocrinology & Metabolism 91(8):2960 –2966Copyright © 2006 by The Endocrine Society Pegvisomant for the Treatment of gsp -Mediated Growth Hormone Excess in Patients with McCune-Albright Syndrome Sunday O. Akintoye, Marilyn H. Kelly, Beth Brillante, Natasha Cherman, Sarah Turner,John A. Butman, Pamela G. Robey, and Michael T. Collins Craniofacial and Skeletal

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