Volume 6, numéro 1 TEL QUE PRÉSENTÉ DANS LE DÉPARTEMENT D’ANESTHÉSIOLOGIE, FACULTÉ DE MÉDECINE, UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL Douleurs aiguës et chroniques après chirurgie : l’exemple de la thoracotomie Comité de l’éducation médicale continue La douleur post-thoracotomie est considérée comme une des plus intenses et des plus prolongées après une chirurgie.1 Cette douleur est complexe car composée de plusieurs types de stimuli: un excès de nociception conduite par des fibres somatiques et viscérales, comme pour toute douleur post chirurgicale, auquel s’ajoute une composante neuropathique importante. De plus, cette douleur concerne plusieurs localisations : la paroi thoracique en regard de l’incision chirurgicale, la plèvre notamment si un drainage thoracique est laissé en place, et l’épaule ipsilatérale. Par ailleurs, les patients opérés en chirurgie thoracique présentent souvent de faibles réserves fonctionnelles cardiorespira- toires, ce qui aggrave les conséquences de la douleur aiguë post-thoracotomie sur la fonc- tion ventilatoire et cardiaque. La prise en charge des patients opérés d’une thoracotomie est un double défi, car le traitement de la douleur aiguë doit être optimal pour une bonne réhabilitation à court terme mais surtout pour prévenir l’apparition de douleur chronique. CHRONICISATION DE LA DOULEUR POST-THORACOTOMIE
Le syndrome de douleur post-thoracotomie est défini selon l’IASP (International
Association of the Study of Pain) comme la récurrence ou la persistance d’une douleur plus
de deux mois après une thoracotomie, en l’absence de récidive de la maladie. Le caractère
neuropathique de cette douleur (sensation de dysesthésie, d’allodynie, de brûlure) est retrouvé
dans 35 à 83% des cas. Lorsque ces symptômes neuropathiques sont présents, la douleur
chronique est plus sévère, a tendance à durer plus longtemps et a un impact plus important
sur la vie quotidienne2. Les mécanismes de chronicisation de la douleur aiguë post-thoraco-tomie sont complexes et mal connus. Toutefois, l’atteinte des nerfs intercostaux associé à un
Université de Montréal
phénomène de sensibilisation centrale est le plus souvent invoqué3,4 même si d’autres méca-
Département d’anesthésiologie Faculté de médecine
L’incidence de la douleur chronique post-thoracotomie après une analgésie classique par
voie intraveineuse est de 61% à 1 an5. Cette incidence varie de 11 % à 80 % suivant les étudesdu fait notamment d’une définition inhomogène de la douleur chronique post-thoracotomieet de régimes antalgiques différents en postopératoire (Tableau 1). Ces douleurs chroniquespeuvent persister plus de 5 ans dans 30% des cas6. Même si l’intensité de cette douleur estsouvent modérée7, elle gène la vie quotidienne dans 50% et le sommeil dans 25% des cas. Deplus, cette douleur est sévère dans 5 % des cas et ne s’améliore pas avec le temps dans plus de40 % des cas2,5. Les facteurs favorisants principaux de la douleur chronique post-thoracotomiesont :
Faculté de médecine
• le type ou l’extension de la chirurgie (résection de paroi thoracique, pleurectomie,
Département d’anesthésiologie
Le contenu rédactionnel d’Anesthésiologie– Conférences scientifiques est déterminé
• l’intensité et la durée de la douleur les premiers jours postopératoires7,8.
exclusivement par le Département d’anesthésiologie,
La présence d’une douleur en préopératoire, l’anxiété postopératoire2,8 et une quantité
importante d’opiacés en postopératoire 5,7 seraient des facteurs favorisants de douleur
chronique selon certaines études. Sur le plan de la physiopathologie, le phénomène de sensi-bilisation centrale est fonction de la quantité d’influx nociceptifs reçus, et de la plasticiténeuronale du patient, qui tend à baisser avec l’âge. Un patient avec une chirurgie moins inva-sive et un traitement antalgique optimal sera donc moins à risque de développer des douleurschroniques4.
.anesthesiologieconferences.ca Ce numéro et le questionnaire d’EMC sont disponible sur le site Internet TABLEAU 1 : Incidence des douleurs chroniques post-thoracotomie Étude (n=) Incidence Approche des douleurs d’analgésie chirurgicale Type d’étude chroniques postopératoire Particularités
en l’absence de récurrence de la maladie
PLT : thoracotomie postérolatérale, VATS : vidéothoracoscopie, ACP : analgésie à la morphine autocontrôlée par le patient, Epi : épidurale thoracique, BIC : bloc intercostal, Parav : bloc paravertébral, AINS : anti-inflammatoires non stéroïdiens * Données sur la douleur aiguë recueillies dans l’étude. PRISE EN CHARGE DE LA DOULEUR
nique chirurgicale ne peut garantir leur préservation;
POST-THORACOTOMIE
• les écarteurs chirurgicaux, présents dans toutes les
Approche chirurgicale
techniques, ont probablement un rôle prépondérantdans l’atteinte des nerfs intercostaux sus et sous
Techniques de thoracotomie ouverte : La relation entre
la douleur post-thoracotomie à un mois et l’atteinte du
Vidéothoracoscopie : La vidéothoracoscopie avec mise
nerf intercostal a bien été démontrée3. Le nerf intercostal
en place de trocarts intercostaux permet de diminuer
peut être atteint lors de l’incision, lors de la mise en place
l’intensité de la douleur et l’altération des troubles venti-
des écarteurs chirurgicaux, lors de la suture du thorax, ou
latoires dans les 72 premières heures postopératoires12.
suite à une résection de côte. La thoracotomie postéro-
Cette technique permet selon certains auteurs de
latérale avec épargne musculaire a été présentée comme
diminuer l’incidence de douleurs chroniques dans la
un moyen de minimiser l’atteinte du nerf intercostal parrapport à une thoracotomie postéro-latérale standard3
première année après la chirurgie de 44% à 30% par
avec une diminution de la douleur et une amélioration de
rapport à une thoracotomie postéro latérale classique13.
la mobilité de l’épaule ipsilatérale10. Toutefois plusieurs
Toutefois, si l’on choisit une analgésie contrôlée par le
études ont remis en cause ces résultats, que se soit en
patient (ACP) avec de la morphine intraveineuse après
termes de douleur aiguë ou de douleur chronique à un
une vidéothoracoscopie et que l’on compare avec une
an9. De même, l’approche antéro-axillaire a été présentée
épidurale thoracique avec un mélange d’anesthésique
comme une technique entraînant moins de douleur aiguë
local et d’opiacé après une thoracotomie postéro-latérale,
et de douleur chronique, mais ce bénéfice n’est pas
l’incidence des douleurs chroniques entre 3 et 18 mois
retrouvé dans toutes les études11. La méthode de fermeture
est essentiellement la même, avec respectivement 36% et
du thorax jouerait aussi un rôle dans l’atteinte nerveuse
33%14. La vidéothoracoscopie permet donc d’améliorer
intercostale. Globalement, les différentes techniques
la prise en charge aiguë des patients mais reste décevante
chirurgicales de thoracotomie ouverte semblent toutefois
pour diminuer l’incidence des douleurs chroniques. Les
entraîner des douleurs aiguës et chroniques similaires.
raisons pour expliquer ces résultats sont le diamètre
Deux éléments d’explication peuvent être avancés :
important des trocarts qui léseraient ainsi le nerf inter-
• les variations anatomiques du cheminement des
costal et l’insertion des trocarts sur plusieurs niveaux qui
nerfs intercostaux sont nombreuses, ainsi aucune tech-
engendrerait une atteinte étagée des nerfs intercostaux.
Approche médicale
préopératoire afin d’éviter un phénomène de sevrage. C’est l’ACP à la morphine, ou à l’hydromorphone en cas
Acétaminophène et anti-inflammatoires : L’efficacité de
d’insuffisance rénale, qui sera prescrit le plus souvent.
l’acétaminophène15 et des anti-inflammatoires non
Dès la reprise d’un transit digestif efficace, un relais
stéroïdiens pour traiter la douleur d’épaule ipsilatérale,
précoce par voie orale sera préféré afin de faciliter la
qui survient chez plus de 80 % des patients après pneu-
monectomie ou lobectomie, n’est plus à démontrer16. Kétamine : La kétamine intraveineuse à la dose de 0,05
Cette douleur d’épaule est secondaire à l’irritation du
mg/kg/h (environ 3 mg/h) pendant 72 h permet une
médiastin, du diaphragme et du péricarde. Sa prévalence
potentialisation d’une épidurale thoracique, associant
semble plus faible en cas de chirurgie thoracique
ropivacaïne 0,15% et morphine 0,05 mg/mL, sans effet
mineure comme les biopsies ou les résections en pointe.
secondaires notables après une thoracotomie postéro-
L’intensité est maximum durant les 24 premières heures
latérale classique20. Elle permet de diminuer les douleurs
postopératoires. Le signal douloureux est conduit par le
courantes à 1 et 3 mois et d’améliorer les capacités
nerf phrénique dont l’origine se trouve en C4, ce qui
physiques à 1 mois. À cette dose, elle n’est pas efficace
explique l’inefficacité de l’épidurale thoracique16.
sur les douleurs à 6 mois ou sur les phénomènes d’hy-
L’infiltration par le chirurgien du nerf phrénique avec un
peralgésie péricicatricielle20. Pour diminuer les phéno-
anesthésique local permet de réduire l’incidence de ces
mènes d’hyperalgésie, la dose recommandée pour les
douleurs17, mais cette technique est peu indiquée à cause
chirurgies majeures est de 0,5 mg/kg/h pendant la
du retentissement respiratoire lié à la paralysie phrénique
chirurgie (soit en continu, soit en bolus itératifs toutes
les 30 minutes) puis du quart de la dose pendant 24 h, et
L’administration d’anti-inflammatoires non stéroï-
du huitième de la dose pendant encore 24 h21. La kéta-
diens permet aussi de réduire la consommation d’opiacés
mine, en association avec une épidurale thoracique, a
de 30%1. Le ketorolac, donné pendant 2 à 3 jours,
d’ailleurs démontré son efficacité pour prévenir les
n’altère pas la fonction rénale chez les patients à fonc-
douleurs chroniques à un an après chirurgie digestive
tion rénale normale qui bénéficient d’une épidurale,
malgré la restriction liquidienne de mise après une
Gabapentin et prégabaline : Le gabapentin, tout d’abord
chirurgie pulmonaire18. Il faudra toutefois éviter leur
commercialisé dans les années 90 pour ses propriétés
prescription en cas de dysfonction rénale préexistante.
anti-épileptiques, est reconnu efficace dans le traitement
Opiacés : Des opiacés liposolubles comme le fentanyl ou
des douleurs neuropathiques chroniques, des syndromes
le sufentanil, ou hydrosolubles comme la morphine
douloureux régionaux complexes, et du syndrome des
peuvent être administrés soit par ACP intraveineuse, soit
jambes sans repos. L’avantage du gabapentin est qu’il
par voie intrathécale (IT) ou épidurale. Le sufentanil
n’interagit pas avec l’hémostase et n’entraîne pas de
intrathécal (IT) (15 - 50 μg) permet une analgésie quasi
dépression respiratoire. De plus, ses propriétés anxioly-
immédiate mais d’une durée limitée (3 h)19. La morphine
tiques peuvent être utiles en préopératoire. Les posolo-
en IT à une dose de 0,5 mg assure une analgésie efficace
gies recommandées sont de 300 à 3200 mg/j en 2 à 3
de 11 heures au repos et de 8 heures à la toux mais ne
prises. La biodisponibilité du gabapentin est de 36% à
couvre pas forcement la période peropératoire19.
60 % et diminue avec la dose ingérée du fait d’une
L’association de ces deux types de molécules parait donc
absorption saturable au niveau de l’intestin grêle. Le
intéressante pour couvrir l’ensemble de la période péri-
gabapentin n’est pas métabolisé et est éliminé dans
opératoire. Cette association en IT permet de réduire de
l’urine, c’est pourquoi une adaptation de posologie est
84% à 30% la proportion de patients qui auront besoin
nécessaire en cas d’insuffisance rénale. Les effets
de morphine au réveil. De plus, lorsque la titration de
secondaires sont rares et peu sévères : vertiges, étour-
morphine est nécessaire, les doses sont divisées par trois.
dissements, céphalées, nausées vomissements, ataxie.
Par ailleurs la durée d’analgésie effective (temps pendant
Selon une méta-analyse récente portant sur 16 études en
lequel l’EVA est > 30) est plus longue avec des opiacés
chirurgies gynécologiques, orthopédiques, rachidiennes,
intrathécaux (22.7 h ± 1.6) qu’avec une ACP seulement
et abdominales23, le gabapentin provoque une diminu-
(16.3 h ± 5)19. Les limites de l’injection IT sont :
tion de la douleur et une épargne morphinique sur 24 h,
• une durée d’analgésie limitée (<24h),
• l’incidence élevée de rétention aiguë d’urine (75% pour
En association avec une épidurale pour des chirurgies
l’association morphine et sufentanil),
des membres inférieurs, on a décelé une diminution de
• le risque de dépression respiratoire retardée qui rend
la douleur, une épargne de solution épidurale sur 72
impératif le monitorage continu du patient pendant les
heures, et une amélioration de la satisfaction des patients
malgré une sensation d’étourdissement présente chez
Toutefois, malgré une bonne analgésie, l’association
35% d’entre eux24. Une étude récente à montré que l’ad-
IT de sufentanil et de morphine ne permet pas d’amé-
ministration de gabapentin à la dose de 400 mg q6h
liorer la fonction ventilatoire évaluée par spirométrie par
pendant 5 jours permettait de diminuer l’incidence et
l’intensité des douleurs ressenties à un mois ainsi que la
L’administration intraveineuse d’opiacés est donc
consommation d’antalgique après une hystérectomie par
utilisée en cas de contre-indication à la réalisation de
techniques régionales axiales. Elle est utile aussi pour
Le gabapentin est efficace pour le traitement des
traiter les douleurs d’épaule réfractaires à l’acétamino-
douleurs persistantes après une chirurgie thoracique avec
phène et aux anti-inflammatoires non stéroïdiens. Elle
une diminution des paresthésies péricicatricielles dans
est indiquée aussi en cas de prise chronique d’opiacés en
75% des cas. De plus, seulement 6,7% des patients inter-
rompent le traitement suite à des effets secondaires
compromis entres les effets délétères hémody-
et 88,9% se déclarent satisfaits26. D’autres études
namiques des anesthésiques locaux et les effets
prospectives randomisées sur des cohortes plus
secondaires des morphiniques (sédation, prurit,
importantes de malades seront toutefois nécessaires
nausée, dépression respiratoire…). Le type d’anes-
pour confirmer ces résultats préliminaires.
thésique local importe peu du moment que l’on
La prégabaline est une molécule plus récente,
utilise des concentrations équianalgésiques. Ainsi, la
apparentée au gabapentin, qui agit sur les mêmes
bupivacaïne 0,1 % ou la ropivacaïne 0,15% associée
récepteurs. Son intérêt réside essentiellement dans
à du fentanyl à 5 µg/mL offre la même efficacité en
sa biodisponibilité fixe de 90 % non saturable. Tout
épidurale après une thoracotomie postéro-latérale.
comme le gabapentin, elle n’est pas métabolisée et
De plus, ces deux associations sont supérieures la
est éliminée dans les urines sous forme inchangée.
ropivacaïne 0,2% sur les douleurs à l’effort30.
Ses indications au Canada sont les douleurs
La concentration optimale de fentanyl en associ-
neuropathiques d’origine diabétique ou les douleurs
ation avec de la bupivacaïne 0,1% est probablement
post-zostériennes. Sa posologie est de 150 à 600
de 5 µg/mL. Des concentrations inférieures de
mg/j en deux ou trois prises. Ses principaux effets
fentanyl nécessitent l’augmentation du débit de
secondaires sont des vertiges (3,3%), des étourdisse-
perfusion et restent malgré tout moins efficaces sur le
ments (4,8%), des nausées (3,7%), des céphalées
plan analgésique. Des concentrations supérieures (de
(1,1%), une somnolence (1,8%), et un oedème
10 à 20 µg/mL) sont associées à une augmentation
périphérique (1,5%) 27. La prégabaline reste peu
des effets secondaires sans bénéfice sur l’analgésie31.
L’adjonction d’épinéphrine en épidurale thora-
cique, à une concentration supérieure ou égale à 1,5
Anesthésie régionale
µg/mL permet d’améliorer les scores de douleur
L’épidurale thoracique : L’épidurale thoracique est
notamment à la toux et de diminuer l’incidence du
considérée la technique idéale d’analgésie après
prurit après chirurgie thoracique ou abdominale32.
thoracotomie ouverte28. Elle permet de diminuer les
Son efficacité est liée à une diminution de la résorp-
complications respiratoires post-opératoires et de
tion systémique des anesthésiques locaux et du
réduire à 21% l’incidence des douleurs chroniques
fentanyl au niveau épidural et peut-être à une action
post-thoracotomie à 1 an9. Elle peut être indiquée en
sur les récepteurs alpha 2 adrénergiques de la corne
cas de vidéothoracoscopie, si le risque de transfor-
dorsale médullaire32. Les inquiétudes concernant la
mation en thoracotomie ouverte est important et si
circulation médullaire suite à l’utilisation d’épiné-
l’atteinte respiratoire du patient est sévère.
phrine en épidurale ne sont pas fondées aux con-
Idéalement, l’extrémité du cathéter épidural doit se
centrations habituellement utilisées.
trouver au niveau concerné par l’incision chirurgi-
Le risque de séquelles neurologiques définitives
cale. La ponction s’effectue donc classiquement
liées à l’épidurale thoracique est estimé à 0,07%
seulement. Toutefois, on veillera à respecter les
L’injection dans le cathéter épidural avant l’inci-
différentes contre-indications et à réaliser ce geste
sion chirurgicale permet de diminuer les scores de
sur un patient conscient et coopératif33.
douleurs à la toux à la 24ème et 48ème heure
Bloc paravertébral : Le bloc paravertébral peut être
postopératoire, mais reste sans effet sur les scores de
réalisé sur un ou plusieurs niveaux, soit en effec-
douleur au repos. Ce bénéfice reste faible puisque les
tuant une injection unique, soit en l’entretenant à
scores de douleur sont dans tous les cas inférieurs à
l’aide d’un cathéter. Il est réalisé par l’anesthésiste
3/10, critère généralement retenu pour décrire une
par voie percutanée ou par voie endothoracique par
douleur contrôlée de manière efficace29. De plus, ce
le chirurgien. Dans ce dernier cas on désigne la tech-
bénéfice se fait au prix d’un retentissement hémo-
nique sous le nom de « bloc intercostal par voie
dynamique peropératoire qu’il faudra soupeser en
extrapleurale ». Le bloc paravertébral permet
regard du gain analgésique chez les patients les plus
d’obtenir un bloc ipsilatéral des nerfs intercostaux et
fragiles9. L’incidence des douleurs chroniques à six
de la chaîne ganglionnaire sympathique. La diffu-
mois semble être la même, que l’injection de
sion épidurale serait présente dans 70% des cas après
l’épidurale ait lieu avant ou après l’incision chirur-
une technique percutanée, mais le volume de solu-
gicale29. L’épidurale doit idéalement être utilisée
tion anesthésique en épidural resterait trop faible
jusqu’au retrait des drains thoraciques, soit pendant
pour engendrer un effet clinique34. La technique
4 à 5 jours en moyenne. Le mode d’administration
comportant un seul point de ponction permet
de la solution anesthésique peut être soit un débit
d’étendre l’anesthésie sur 5 niveaux sensitifs si un
continu à 0.1 mL/kg/h que l’on adaptera en fonc-
volume suffisant de solution anesthésique est utilisé
tion de l’efficacité clinique, soit une administration
épidurale autocontrôlée par le patient (PCEA)
En injection unique après une vidéothoraco-
autorisant un débit de base de 4-6 mL/h et des bolus
scopie, le bloc paravertébral, avec 0,4 mL/kg de
bupivacaïne 0,375% avec épinéphrine, permet un
Le type de solution utilisée en épidurale
meilleur contrôle de la douleur au repos et à la toux
thoracique associe le plus souvent un anesthésique
sur 48 heures qu’une ACP35. Des injections multi-
local à longue durée d’action (bupivacaïne ou ropi-
ples et étagées de 5 mL de bupivacaïne 0,5% avec
vacaïne) à un morphinique liposoluble (fentanyl ou
épinéphrine sur 6 niveaux assurent une bonne
sufentanil). Cette association représente le meilleur
diffusion de l’anesthésique local mais semblent
raccourcir la durée d’analgésie à 6 heures seule-
pariétale réalisé par le chirurgien par voie endotho-
ment36. Une méta-analyse récente comparant le
racique, et entretenu avec 0,1 mL/kg/h d’anes-
bloc paravertébral à l’épidurale thoracique après
thésique local. Un blocage continu des nerfs inter-
thoracotomie a retrouvé que la qualité d’analgésie
costaux sur plusieurs niveaux est ainsi obtenu à la
était identique sur les 48 h postopératoires, avec
condition que la plèvre pariétale soit intacte pour
moins d’effets indésirables (hypotension artérielle,
servir de réservoir. Cette technique, qui s’apparente
nausées, vomissements, rétention aiguë d’urine), de
vis-à-vis de l’espace de diffusion à un bloc
complications pulmonaires et d’échecs paraver-
paravertébral, est supérieure aux opiacés par voie
tébral37. De plus le bloc paravertébral pourrait être
systémique et équivalent à une épidurale thoracique
intéressant pour la prévention des douleurs
pour le contrôle de la douleur39. Toutefois, bien que
chroniques34. Les résultats de ces études plaident en
peu de cas de toxicité systémique à la bupivacaïne
faveur de l’utilisation du bloc paravertébral après
aient été rapportés, les taux plasmatiques peuvent
thoracotomie en première intention au même titre
qu’une épidurale thoracique d’autant plus que cebloc semble facile à maîtriser et grevé d’un taux
CONCLUSION
d’échec inférieur à 10%34. Il peut aussi représenter
La douleur chronique post-thoracotomie est un
une alternative plus sûre que l’épidurale thoracique
phénomène fréquent qui en l’absence de prévention
en cas d’état septique possible ou de trouble modéré
touche plus de 50 % des malades. Cette douleur
de l’hémostase34. Les risques principaux de compli-
chronique a un retentissement important sur la
cations et leur fréquence sont estimés à 3,8 % pour
qualité de vie des patients et un coût social impor-
la ponction vasculaire, 4,6% pour l’hypotension
tant. Elle peut être prévenue par une stratégie péri-
artérielle (par mécanisme vagal ou hypovolémie),
opératoire multimodale adaptée : chirurgie la moins
1,1% pour la ponction pleurale et 0,5% pour le
délabrante possible, analgésie efficace par épidurale
thoracique ou cathéter paravertébral. Si la kétamine
Injection intrapleurale d’anesthésiques locaux :
semble apporter un bénéfice supplémentaire à la
L’injection intrapleurale de 20 mL de bupivacaïne
phase aiguë et à la phase chronique, sa posologie
0,5% toutes les 4 h après une thoracotomie ne fait
optimale reste à déterminer. Enfin, le gabapentin et
pas mieux qu’une injection de sérum physiologique
la prégabaline paraissent prometteurs grâce à leurs
sur les scores de douleur et la consommation d’opi-
propriétés pharmacologiques pour la prévention des
acés postopératoire. De plus, dans le groupe qui
douleurs chroniques. Toutefois, leur place en
reçoit de la bupivacaïne, deux patients sur 40
chirurgie thoracique doit être précisée par d’autres
décrivent des symptômes neurologiques de toxicité
systémique aux anesthésiques locaux après l’injec-tion. L’absence d’efficacité et les risques encourus de
Points à retenir :
toxicité font que l’injection intrapleurale d’anesthé-
• La douleur chronique post-thoracotomie est
siques locaux ne doit plus être réalisée 38.
définie comme une douleur qui persiste plus de 2
Bloc intercostal : Le bloc intercostal peut être réalisé
par l’anesthésiste par voie percutanée ou par le
• La douleur chronique est un phénomène qui
chirurgien par voie interne. Il s’agit le plus souvent
touche plus de 50 % des malades en post-thoraco-
de l’injection sur plusieurs niveaux de 2 à 3 mL de
tomie. La composante neuropathique de cette
bupivacaïne à 0,5% avec épinéphrine. Cette tech-
nique est supérieure aux opiacés par voie systémique
• Les mécanismes de chronicisation de la douleur
pour le contrôle de la douleur postopératoire. Même
aiguë post-thoracotomie font intervenir l’atteinte
si la durée de l’analgésie est limitée à moins de 24 h
du nerf intercostal et un phénomène de sensibili-
lors d’une simple injection, le bloc intercostal
semble efficace sur plusieurs jours. Le bloc peut être
• Une vraie stratégie de prise en charge analgésique
réalisé en pré- ou post-opératoire, sans modification
des malades opérés d’une thoracotomie doit être
de son efficacité. Le risque estimé de pneumothorax
proposée pour prévenir l’apparition des douleurs
est de 0,07%, sachant que l’indication d’un drainage
est fréquente en chirurgie thoracique. De plus,
• L’épidurale thoracique associant un anesthésique
aucun cas de toxicité systémique n’a été rapporté sur
local et un opiacé liposoluble ainsi que le cathéter
une cohorte de 11 000 patients39. La mise en place
paravertébral restent les techniques de choix pour
d’un cathéter à proximité du nerf intercostal a été
traiter la douleur aiguë post-thoracotomie et
décrite mais offre une analgésie de qualité inférieure
à une épidurale thoracique et fait courir le risque
• La vidéothoracoscopie permet de diminuer l’in-
d’ostéomyélite40. Enfin, contrairement à l’épidurale
tensité des douleurs aiguës post opératoires mais
thoracique, le bloc intercostal ne semble pas dimi-
ne permet pas de diminuer l’incidence des
nuer les complications respiratoires. Cette technique
ne peut donc pas être proposée en première inten-tion en post-thoracotomie. Le docteur Clément Chassery est anesthésiologiste au Centre
C’est pourquoi certaines équipes prônent le bloc
Hospitalier Universitaire de Toulouse, France. Il est présente-
intercostal par voie extrapleurale: un cathéter est
ment moniteur clinique à l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont, à
inséré au niveau d’un décollement de la plèvre
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Les avis de changement d’adresse et les demandes d’abonne-
ment Anesthésiologie – Conférences Scientifiques doivent être
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envoyés par la poste à l’adresse B.P. 310, Station H, Montréal
management. Anesthesiology 2005;102:211-20.
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22. Lavand’homme P, De Kock M, Waterloos H, et al. Intraoperative
courrier électronique à l’adresse info@snellmedical. com.
epidural analgesia combined with ketamine provides effective preven-tive analgesia in patients undergoing major digestive surgery.
Veuillez vous référer au bulletin Anesthésiologie – ConférencesAnesthesiology 2005;103(4):813-820. Scientifiques dans votre correspondence. Les envois non
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distribuables doivent être envoyés à l’adresse ci-dessus.
systematic review of randomized controlled trials. Pain 2006;126:91-
L’élaboration de cette publication a bénéficié d’une subvention à l’éducation de
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The Supreme Court Case of Marley v. Rawlings & Another: A Mix-Up in Wills In December 2013, the Supreme Court heard the ongoingdispute between two biological brothers and their‘adopted’ sibling af ter their parents, Alf red Rawlings andMaureen Rawlings, mistakenly signed each other’s wil s. The issues bef ore the Supreme Court were:(1) Whether, when a person mistakenly execut
Discussion with an Accomplished Silicon Valley Venture Capitalist Geneva, and Zong in Menlo Park, California. Dr. Hassanein is the Willard Brown Distinguished Visiting Professor at AUC (American University in Cairo) member of the Board of Advisors. He lectured on Management Science and Dr. Hassanein’s Biography Engineering at Stanford University and the University of Sa